PHILIPPE CONTICINI a passé son enfance dans les cuisines du restaurant de ses parents. Initié au goût depuis son plus jeune âge, il s’est spécialisé en pâtisserie, glacerie et chocolat auprès de grandes maisons comme le Gray d’Albion de Jacques Chibois ou le Trou Gascon d’Alain Dutournier avant d’ouvrir sa propre maison, La Table d’Anvers où ses desserts ont laissé d’émouvants souvenirs. Chef de cuisine chez Petrossian, initiateur de concepts de New-York à Tokyo, Philippe Conticini a radicalement modernisé la pâtisserie française par un regard acéré et ultra précis sur les goûts et les textures. Depuis 2009, Philippe Conticini a ouvert 5 Pâtisseries des rêves à Paris et au Japon.
Extrêmement importante ! En pâtisserie, c’est un élément aussi capital que le beurre, le sucre, la farine ou les oeufs. J’en consomme des centaines de kilos par mois. Même si aujourd’hui, je l’utilise tout de même un peu moins car j’ai inventé dans les années quatre-vingt-dix, une émulsion 50 % lait – 60 % crème pour faire des mousses. Car en fait, quand je mange une mousse de fraise, je veux retrouver ce goût de la petite siflorette posée dans une cuillère, recouverte de crème liquide et qui se mélange en bouche avec le jus de fraise qui vient s’exploser sur les papilles et la douceur de la crème venant arrondir l’acidité du fruit. J’ai cherché longtemps pour trouver une structure neutre en goût qui donne de la rondeur, équilibre l’acidité mais laisse toute la place à la fraise. Mon émulsion mi crème mi lait, extrêmement pauvre en matière grasse, garde un goût neutre, se tient aussi bien que les blancs montés et me permet de créer des mousses plus légères avec, enfin, exactement ce que je voulais en bouche.
Je puise dans le vaste champ des possibles et la traite de toutes les manières possibles. Basique, montée en chantilly dans des mousselines, des crèmes. En liaison d’un jus réduit. Dans la ganache ou la crème brûlée, il y en aura forcément un peu. Et aussi pour le glaçage à la crème : au pistolet compresseur pour pouvoir contrôler l’épaisseur qui joue sur le goût. Dans ce cas, je veux qu’elle soit juste un décor. Enfin, dans mes biscuits où la crème joue de rôle d’humidificateur et de porteur de goût.
Il y a mille et une façons d’utiliser la crème, comme le sucre d’ailleurs ! Principalement liquide, dans quelques préparations. Ainsi dans le clafoutis qui est cette année une priorité, pour lequel j’en ai essayé des tonnes ; c’est finalement une crème épaisse car l’acidité est différente. Je voulais respecter l’idée – une structure et un souvenir – que j’avais du clafoutis petit. Pour le biscuit vanille, j’ai goûté pas moins de 7 ou 8 crèmes.
La crème je m’en sers pour la structure, le goût, la réaction au four, etc. Je vais jusqu’au fond et au fond et au fond ! Donc quand je l’utilise, je sais exactement ce que je veux pourquoi et comment.
Le grand cru vanille sorti l’an dernier. Pour le coup, il y a effectivement un peu d’émulsion lait mais principalement de la crème, terriblement foisonnée, pour porter le goût vanille. Ça fait comme un gros câlin : puissance vanille et en même temps douceur et gourmandise très intenses. Pour cette douceur, la crème est un élément capital.
À la folie bien sûr car elle a été tellement importante dans ma carrière, ma vie, mon travail. Elle et tout ce qui la compose apportent mille choses différentes. Je la décortique totalement et tout ce qui la compose me permet de structurer ma pâtisserie. J’adore le goût de la crème.
Heu…, le Saint Honoré, avec la crème que je fais moi ( 85 % de crème pour 15 % de mascarpone ). Ou l’Agache, un gâteau d’un pâtissier autrichien, rue Poncelet.